Démarche:
J’ai à cœur de créer une relation intime et vulnérable avec le végétal pour laisser apparaître la sensibilité, la subtilité, la fragilité et la poésie de sa présence.
Dans mon processus créatif je m’intéresse à la préciosité du vivant. Au grès de mes promenades je vais être attiré par un détail qui va devenir un axe d’expérimentation dans mes créations.
Je crois qu’au travers de mes œuvres je tente inlassablement de toucher cet espace sensible qui se joue entre la nature et moi, entre les autres et moi. J’aime l’idée du lien souvent invisible qui nous unis et nous fait nous sentir vivant. Ce lien qui éveille en nous l’émerveillement, qui nous rappelle la préciosité de la présence de l’autre. Entrer dans cet espace intime c’est aller à la rencontre de la singularité, de la préciosité, du sacré, de la fragilité et de l’évanescence de l’instant.
C’est la vulnérabilité de la matière qui conduit mon geste. Chaque geste demande une grande attention. Dans cet espace intime de la relation il y a un geste qui tente de restaurer et de redonner toute la préciosité et la délicatesse du vivant.
Il y a parfois un geste réparateur, celui qui vient panser le vivant. Le végétal se voit orner de pierres, de verre, de plumes …
De cet espace sensible, Je prends conscience de la présence de l’autre et des émotions qui se dégagent de cette relation.
J’aime aller déceler le détail parfois infime qui différencie chaque être. Se rapprocher au plus près des Etres pour en desceller ses particularités, son unicité et sa beauté.
La préciosité du végétal se manifeste très souvent dans la délicatesse et la transparence de la porcelaine. La lumière passe à travers les pièces de porcelaine et redonne une sensation de mouvement et de vie au végétal.
Mes œuvres sont issues de ces rencontres entre émerveillement, fragilité, et évanescence de l’instant.
Rebelle par nature aux théorisations, profondément complexe, le sensible échappe à nos modes d’investigation conventionnels qui, de fait, ont préféré s’en débarrasser. Il représente pourtant cette réserve d’invisible où se nouent les liens fondamentaux entre existants. Dans l’entrelacs foisonnant des liens sensibles se meut chaque être vivant.
Reconnaître le végétal pour ce qu’il est, vivant mais fondamentalement différent de nous mêmes, c’est oser ce nécessaire voyage de la rencontre et de la relation.
Je m’interroge sur le fil du sensible qui unit les êtres vivants les uns aux autres. Comment le médium lui même sensible joue un rôle dans la transmission ? La relation lorsqu’elle arrive dans le champ de l’art est t’elle la même qu’en réel?
C’est le sensible lui même qui ouvre le monde
Fascinée par le brouillage des frontières entre le visible et l’invisible, entre la nature et l’humain, entre l’inerte et la vie, je tente de me rapprocher au plus près de mon environnement et des éléments qui le compose pour questionner la présence de vie et les intéractions entre les éléments. Souvent une distinction se fait entre l’humain et la nature, à travers un vocabulaire anatomique (cicatrice, plaie, résilience…) j’essaie de questionner les corrélations et les pénétrations entre le monde dit naturel et celui de l’humain. Par un contact direct avec le vivant je tente de questionner les relations entre le vivant et la matière. Dans son ouvrage la vie sensible, Emanuele Coccia parle de la puissance de réception du médium. Selon lui tous les corps peuvent devenir médium pour une forme qui existe à l’extérieur d’eux. « Quand une forme entre dans l’épaisseur de la matière de son récepteur, elle change et elle se change, elle se transforme et elle transforme. ». Lorsque la porcelaine rentre en contact avec le vivant est elle en capacité de réceptionner des caractéristiques d’un végétal?
Peut on parler d’ANTHROPOMORPHIE du végétal ? Peut on attribuer une sensibilité et des sensations au monde végétal ? Très souvent les notions de RELATION et de RESILIENCE prennent corps dans mes travaux. La relation que nous entretenons aux choses, est elle intense, profonde ou inexistante? La résilience se manifeste dans le processus de création et dans les gestes artistiques. Le bois qui subi une transformation par le feu fait apparaître des cicatrices, des plaies, des crevasses et le geste artistique est d’apporter une attention et un temps pour panser, caresser, apaiser les plaies subies suite à la combustion.
C’est une rencontre sensible et intime qui m’amène à méditer sur les choses 1ères, sur l’essence de la nature, sur sa substance, sur l’origine de la force de la vie.
En quête de la connaissance interne de l’être, de la matière et du matériau, de la manifestation de la vie dans le moindre détail. Se familiariser avec l’insignifiant, avec l’invisible , pour créer une relation intime aussi vulnérable soit elle pour laisser apparaître la sensibilité, la subtilité, la fragilité et la poésie de sa présence. Tenter de repousser les limites de l’insignifiance, tenter de créer une nouvelle attention et une nouvelle relation aux choses.
Les feuilles d’un arbres semblent toutes identiques, pourtant elles ont chacune leur particularité, leur existence propre et contribuent au TOUT. Donner et redonner un espace à chaque organisme pour lui laisser la place d’exister.Bousculer les frontières dans l’espace du sensible entre une matière qui semble inerte et le vivant. Questionner l’ interpénétration entre l’humain, la nature, l’architecture, la matière….
La coopération que l’on observe chez certain organisme tend vers un certain équilibre que l’on nomme SYMBIOSE. La SCIENCE nous montre les relations et les interactions entre différents organismes qui influencent chaque être vivant, et je tente de m’approcher d’un point de vue sensible et poétique de ces relations souvent invisibles mais qui semblent primordiales pour maintenir un certain équilibre.
Une poésie émerge au travers du geste plastique, une expérience unique où l’on EST tout simplement. Une communion naît de la rencontre et du côtoiement intime avec la matière. Le processus créatif se réinvente au grès des rencontres et de l’expérimentation.
Biographie :
Christèle Thoreux
Je suis née en Bretagne et je vie et travaille en France.
J’ai été influencé par mes deux ans passées avec des tribus Kanak, Vanuataise et Aborigène sur la relation à la vie, au vivant et à l’environnement. C’est dans un travail de recherches au travers d’ouvrages scientifiques, philosophiques, géographiques, esthétiques et sociologique qu’un monde poétique, esthétique et sensible émerge.
J’ai commencé par suivre deux années d’études d’arts plastiques et d’architecture à l’université de Villegean à Rennes en 1998. J’ai ensuite passé un brevet professionnel en métallerie- ferronnerie et fréquenté les ateliers Simon à l’Hermitage, ainsi que les ateliers Cuivre Inox à Tinténiac et les ateliers Saint Eloi à Toulouse, au sein desquels j’ai développé un travail autour du métal. Mon goût pour l’architecture m’a conduit pendant 4 ans à accompagner des chantiers de réhabilitation de monuments historiques.
J’ai ensuite repris mon cursus universitaire à l’université du Mirail à Toulouse en 2007 pour passer une licence en arts plastiques et en sciences de l’éducation.
J’ai poursuivi en master Arts plastiques à l’université d’Aix Marseille, et j’ai passé le Capes et l’agrégation en arts plastiques. J’ai enseigné en Lycée et en collège pendant 12 ans en métropole et en Nouvelle Calédonie. J’ai participé et crée à de nombreux projets artistiques en collaboration avec des artistes et en partenariat avec la Drac, la DAAC, le ministère de la culture et l’éducation nationale.
Depuis 2020, j’ai quitté l’éducation nationale pour me consacrer pleinement à ma pratique artistique.